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Les options pour le service militaire en algérie.

mardi 16 avril 2013, par Maurice Faivre

Le collationnement des chiffres recueillis par la Direction centrale du Service national (DCSN) permet de faire le bilan de l’application de l’accord franco-algérien de 1985 à 1993.
Globalement, 30.995 Français d’origine algérienne ont fait le choix du service en Algérie. Mais de 1988 à 1993, seulement 897 jeunes ont effectué un service en Algérie. En l’absence de données sur les services effectués avant 1988, il n’est pas possible de préciser la proportion de ceux qui n’ont fait aucun service. Si l’on suppose que 600 garçons ont effectué un tel service de 1985 à 1987, on obtient un pourcentage de 95% de jeunes, échappant à tout service ( parmi ceux qui ont fait l’option algérienne).

Quant aux options non suivies de ”certificats de service” de la part des autorités algériennes, elles sont conservées “en attente” , et la dispense est prononcée par la DCSN lorsque les intéressés atteignent 29 ans. 6341 dispenses ont été accordées dans ces conditions depuis 1985.

Il apparaît ainsi que :

  • l’option pour le service en Algérie permet au jeune d’avoir une forte probabilité, proche de 95%, de ne faire aucun service. Pour le service en France cette probabilité est de 30 à 35% pour des jeunes ayant un faible niveau scolaire. On peut penser que cette comparaison des chances est une motivation importante du choix.
  • c’est en définitive l’autorité algérienne qui décide l’exemption de 95% (29.500 garçons en huit ans) des jeunes qui ont fait cette option.
    Dans ”le Service en chiffres 1992”, la DCSN observait que les classes 1987 et 1988 devraient atteindre un volume de 4000 options. Le tableau joint met en évidence la baisse des options, amorcée en 1989 si on lit le tableau en suivant les lignes diagonales. Cette décrue peut être attribuée à l’évolution de la situation en Algérie. On peut penser que les classes suivantes se stabiliseront autour de 3000 options. En 1992 s’est produite une remontée de 1300 à 1600 options, mais la baisse s’est accentuée en 1993 (1161 options)..

Ces observations mettent en lumière les conséquences négatives de l’accord franco-algérien en ce qui concerne l’intégration des jeunes Français d’origine algérienne. La question qui se pose a été soulevée le 22 avril 1993 lors de l’audition de M. Marceau LONG devant la Commission des Lois de l’Assemblée nationale. C’est la suivante :

Le service militaire en France est-il un facteur d’intégration pour les jeunes d’origine musulmane ?
Si la réponse est positive, il faut dénoncer l’accord franco-algérien, comme l’a proposé la Commission Marceau LONG, ainsi que les députés qui le 13 mai 1993 ont voté l’article 38 bis de la loi sur le droit de la nationalité. ( Mais d’autres conventions devraient aussi être réexaminées). Les mesures prises à la suite du rapport BIVILLE commencent à porter leur fruit. L’institution à Baden Baden d’un conseiller du commandement (Adjudant-chef BOUARES) pour les affaires musulmanes a permis de dénouer plusieurs cas de manquement à la discipline. Il est souhaitable que cette institution soit étendue à toutes les Circonscriptions militaires de Défense, et assurée par des militaires français, sans interférence des instances civiles musulmanes. Mais il faut aussi réfléchir au problème des 35% qui sont exemptés ou dispensés du service national en France, et pour lesquelles des formules analogues au SMA des DOM-TOM devraient être réétudiées (proposition du rapport CHAUVEAU).
Traiter un problème suppose que l’on en connaît toutes les données. Or ce n’est pas encore le cas en matière de statistique et de sociologie :

  • L’INSEE ne recense pas les bi-nationaux, et l’on ignore combien de jeunes d’origine algérienne (mais aussi marocaine, tunisienne, turque et africaine, dont le nombre est croissant) sont susceptibles d’être appelé au service. Or sans violer la Loi Informatique-Libertés, il suffirait à la DCSN de collationner la nationalité des parents, recueillie dans les Centres de Sélection, pour avoir un ordre de grandeur des nationalités concernées.La DCSN devrait également préciser l’origine des autres bi-nationaux dispensés, dont le nombre dépasse 6000 par an (voir tableau).
  • Le colonel BIVILLE s’intéresse aux jeunes qui font leur service militaire en France, mais il ne les voit ni avant ni après, ce qu’avait fait le professeur MUCCHIELLI. Des études sociologiques seraient très utiles pour déterminer :
  • quelles influences s’exercent sur les jeunes dans le cadre de la famille, de la religion, des associations, des consulats, des amicales d’étrangers en France,
  • quelles sont les vraies motivations pour le service en Algérie,
  • quel impact a le service (militaire et civil), en France et surtout en Algérie, sur les jeunes qui l’ont accompli.

LES OPTIONS POUR LE SERVICE EN ALGÉRIE

Mon ami Bôle du Chaumont a publié dans “le Combattant” n°244 (Oct.déc.1995), les lettres qu’il a adressées au Ministre à ce sujet, et la réponse reçue de M. Léotard. Suivant ce problème depuis une dizaine d’années (nombreux articles dans le Casoar, Défense nationale, Hommes et Migrations, Afrique et Asie modernes), je partage tout à fait son indignation sur les dangers présentés par l’accord Mauroy-Ibrahimi de 1983. Cet accord est absolument dérogatoire par rapport aux Conventions conclues avec d’autres Etats, pour les raisons suivantes :

  • la notion de nationalité des pays coraniques est inconciliable avec celle des pays occidentaux,
  • le libre choix est laissé aux bi-nationaux franco-algériens, alors que dans les autres Conventions le Service est accompli dans le pays de résidence,
  • le service dans la Réserve n’est pas évoqué, faute d’accord entre les parties.
    A ces dérogations juridiques s’ajoutent les disparités dues - à la durée du service (18 mois) - à la sélectivité du recrutement (15% en raison de la surnatalité algérienne) - à la formation idéologique dispensée par des “officiers politiques”. Le Service en Algérie n’est donc pas un facteur d’intégration !
    Ceci dit, l’évolution numérique montre une diminution importante des options pour l’Algérie, et davantage encore des services accomplis dans ce pays (30 en 1995).Les tableaux joints montrent que les options sont passées de 9.229 en 1985 à 504 en 1994, avec une légère remontée (875) en 1995. La DCSN note qu’en 1995, il n’y a que 21% d’options pour l’Algérie. Elle attribue la remontée de 1995 à l’augmentation de la ressource, et à la pression des familles et des consulats : certains jeunes sont inscrits par les parents sans être consultés.On peut se demander d’autre part si un certain nombre de beurs ne sont pas partis en Bosnie.

Il faut savoir que le principal intérêt de l’option algérienne pour les jeunes est d’échapper à tout service, avec 95% de chances d’être exemptés, alors qu’en France, à niveau scolaire faible, le taux serait de 40%.

L’abandon de la conscription en France devrait remettre en cause tous les accords conclus. La DCSN ne pourra donc plus suivre le nombre des options pour l’Algérie. Mais on peut se demander si un double-national sera tenu de se présenter au “rendez-vous citoyen” . Il ne faut d’ailleurs pas se faire d’illusion sur le rôle formateur des ces” six jours”.