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Témoignage du général d’armée Edouard Mathon

(23 avril 1999) CONFIDENTIEL

mardi 18 mars 2014, par Maurice Faivre

Ayant servi sous ses ordres alors que je commandais le 13ème RDP, je bénéficiais de sa confiance. Il s’intéressait à mes recherches historiques, et il m’a reçu à plusieurs reprises dans son appartement de la place Saint Michel. Je l’ai même accompagné à l’Institut d’Histoire du Temps présent, où il a complété l’exposé que faisait Sellam Sadek sur l’affaire Si Salah. Il est décédé avant d’avoir eu le temps d’évoquer ses souvenirs ultérieurs, en particulier sur la visite du général de Gaulle à Baden-Baden, le 29 mai 1968. Ayant constaté que cet épisode ne figure pas dans l’inventaire des archives orales, je crois utile pour l’Histoire de rapporter son témoignage, que j’ai recueilli le 23 avril 1999.

La rencontre de Gaulle-Massu a fait l’objet de plusieurs comptes-rendus : du général Massu lui-même, du général de Boissieu, de l’amiral de Gaulle et plus récemment, dans Le Point du 10 janvier 1983, du capitaine Richard, aide de camp de Massu. Aucun de ces témoins cependant n’a rapporté ce qu’était l’intention initiale du général de Gaulle. Selon le général Mathon, le chef de l’État avait l’intention de se retirer en Irlande, et avait demandé que l’on prévienne le gouvernement allemand de son passage par la RFA. Le général Mathon a pris prétexte de l’absence du général Karpinski, chef de la Mission de liaison de la Bundeswehr, pour différer cette transmission. Le général Massu ayant convaincu le chef de l’État de rejoindre son poste, le message n’a donc pas été transmis.

Cette version des faits explique sans doute la convocation de l’amiral de Gaulle et de sa famille. Le général Mathon leur a donné une villa à la Vogesenstrasse, où ils sont restés quelques jours.

Lors de son escale sur le terrain de Baden-Oos, le général de Gaulle a été salué par un général appartenant je crois au Commandement de l’Artillerie des FFA, qui lui aurait fait comprendre que s’il voulait bénéficier du soutien de l’armée, le Chef de l’État se devait d’amnistier les officiers encore emprisonnés à la suite de l’affaire algérienne. Cette amnistie a été accordée quelques jours plus tard.

Maurice Faivre, le 24 février 2004